La place grandissante que prend le SEO dans la rédaction de contenus sur Internet met aujourd’hui à l’honneur la rédaction web. Maîtriser l’écriture optimisée pour le Web est sans aucun doute l’une des compétences les plus recherchées dans le monde du digital.  Mais cette rédaction web voit également arriver l’émergence d’une écriture simple et parfois simplifiée, avec son lot d’erreurs de grammaire, d’approximations de syntaxe ou encore de problèmes de conjugaison. L’optimisation des textes autour de requêtes ciblées et de mots-clés vient régulièrement nuire à la cohérence syntaxique de l’ensemble. Mais ce critère est-il pris en considération par les algorithmes des moteurs de recherche actuels ?

Il existe de nombreuses théories autour de l’orthographe et la grammaire dans les milieux SEO. Pour certains, l’orthographe n’influence pas du tout le référencement d’une page web : au contraire, se positionner sur des requêtes avec des fautes d'orthographe ou de frappe permettrait à un site d’attirer à lui tout internaute maladroit ayant fait la même erreur.

Pour d’autres, les fautes d’orthographe seraient considérées par Google comme un signal de mauvaise qualité pouvant nuire à un site web, voire le déréférencer.

Voici un petit tour d’horizon de ce que l’on sait aujourd’hui sur la prise en compte de l’orthographe dans les résultats des moteurs de recherche.

Que dit Google sur l’orthographe ?

Les recommandations de Google font de l’orthographe l’une des bonnes pratiques pour un bon référencement. Pour comprendre la logique de la prise en compte de l’orthographe par Google, il convient de revenir sur le contenu publié par l’entreprise à ce sujet. Google s’exprime peu sur cette thématique : quand il le fait, c’est bien souvent pour orienter ses utilisateurs dans la rédaction d’un contenu de qualité destiné au Web.

Les préconisations du site Google Search Central

Sur le site Google Search Central, on peut retrouver de manière explicite l’importance d’une bonne expression et d’une grammaire adéquate.

Ainsi, dans son « Guide pour débutant SEO » Google précise les points suivants :

« Les internautes apprécient le contenu bien rédigé et facile à lire » ;

« Négliger la rédaction d'un texte et y laisser des fautes de grammaire et d'orthographe » est une pratique à éviter ;

« Utiliser du contenu maladroit ou mal écrit » est une pratique à éviter.

Google regarde ainsi l’orthographe et la grammaire sous l’angle de l’expérience utilisateur : l’internaute appréciera une page web bien écrite et sans fautes. À aucun moment l’orthographe n’est explicitement citée comme variable de l’algorithme de Google pour positionner une page dans les SERP. Pourtant, cette approche de l’orthographe orientée vers l’utilisateur ne semble pas dénuée de conséquences sur le bon référencement d’un site web.

 

2011, l’intervention de Matt Cutts, porte-parole de Google sur le sujet de l’orthographe

Comme on l'a dit précédemment, la firme de Mountain View s’exprime très peu sur le sujet de l’orthographe. Ainsi, les dernières interventions à ce sujet datent d’une période lointaine : en 2011, lors d’une session de réponse aux questions des utilisateurs, Matt Cutts, l’ancien porte-parole de Google, confirmait cette vision de l’orthographe et de la grammaire au sein de la firme californienne.

 

Question posée à Matt Cutts en 2011 à ce sujet.

La question posée par l’utilisateur est la suivante : « Do spelling and grammar matter when evaluating content and site quality? » (« L’orthographe et la grammaire sont-elles prises en compte dans l’évaluation de la pertinence d’un contenu et de la qualité d’un site ? »).

La réponse de Matt Cutts sur le sujet est claire :

« It’s not one of the over 200 different signals that we use to assess the quality of a page. But I think it would be fair to think about using it as a signal. » (« Cela ne fait pas partie des plus de 200 critères utilisés pour évaluer la qualité d’une page. Mais je pense qu’il serait pertinent de l’utiliser comme un bon indicateur. »)

Ainsi, l’absence de prise en compte de critères orthographiques et grammaticaux par l’algorithme de Google ne signifie pas que ces derniers ne comptent pas du tout : Matt Cutts précise l’existence d’une corrélation indirecte entre le Pagerank d’une page web (sa popularité) et une bonne orthographe. Concrètement, cela signifie qu’une page web bien écrite aura, a posteriori, plus de liens entrants qu’une page web avec des fautes d’orthographe.

Quelles conclusions sur l’importance de l’orthographe pour Google ?

Mais, est-ce réellement une donnée importante ? Et cette corrélation crée-t-elle une relation causale entre l’orthographe et le référencement d’une page web ? Rien n’est moins sûr : les pages avec autorité sont naturellement plus soignées que certaines pages tombées dans les limbes de Google. On fait toujours plus attention aux pages que l’on souhaite mettre en avant.

Dans la structure d’un site web, la page que l’on souhaite mettre en avant (page de vente, page services, etc.) se doit d’être naturellement une page riche, bien rédigée, car visible par l’internaute. Il en est de même pour le maillage externe : les PBN et autres sites secondaires sont très souvent moins soignés que les sites qui ont vocation à monter dans les classements. Sur Internet, la quantité pousse parfois la qualité. L’orthographe n’entre donc pas directement en ligne de compte pour faire monter une page en utilisant des méthodes peu propres, il n’est qu’un gage de qualité qui justifiera la présence de liens entrants.

C’est ainsi dans cette optique de qualité que l’orthographe et la grammaire d’une page web doivent être analysées : si votre page est bien rédigée, elle attirera naturellement plus de liens externes qu’une page mal rédigée.

2014, prise de parole de Matt Cutts sur la grammaire des commentaires

Un site web, ce n’est pas seulement du contenu écrit par le propriétaire du site. Dès lors, la bonne rédaction des commentaires laissés par les internautes sur un site web a-t-elle un impact sur le SEO de ce site ?

Aux yeux de Google, les sites web et plus particulièrement les blogs qui s’ouvrent aux commentaires des internautes ne sont pas responsables de la qualité des commentaires extérieurs. C’est ainsi que s’exprime en 2014 Matt Cutts à ce sujet : « I wouldn’t worry about the grammar of your comments. As long as the grammar on your own page is fine, there are people, and they write things, and it doesn’t always make sense » (« Je ne me soucierais pas de la qualité des commentaires laissés sur votre blog tant que votre site en lui-même respecte les règles de grammaire. Les gens écrivent beaucoup de choses sur Internet, et cela n’a pas toujours de sens. »)

Question posée à Matt Cutts en 2014 à ce sujet.

 

« Just make sure that your own content is high quality » (« Assurez-vous d’avoir un contenu de qualité sur les pages de votre site, cela suffira »).

Le message est, une fois de plus, très clair de la part du porte-parole de Google. Le contenu venant de l’extérieur n’a aucune incidence sur votre site puisqu’il n'est pas de votre fait.

 

Google et le correcteur orthographique

Depuis ces vidéos qui peuvent aujourd’hui sembler lointaines, la firme californienne ne semble pas avoir évolué sur ces considérations. Il en ressort ainsi que l’orthographe n’a pas de réelle influence sur l’algorithme de Google. Dès lors, un grand nombre de débats existent autour d’un éventuel intérêt à se positionner sur des requêtes mal orthographiées.

Le constat est en effet simple : si Google ne pénalise pas les pages mal orthographiées, se positionner sur des requêtes concurrentielles avec des fautes d’orthographe permettrait de capter une partie des utilisateurs maladroits. Les fautes d’orthographe pourraient ainsi constituer une nichesur des requêtes de longue traîne, pour amener quelques utilisateurs supplémentaires sur son site.

C’est sans compter sur la mise en place par Google d’un correcteur orthographique pour assister l’utilisateur dans ses recherches.

Aujourd’hui, si l’algorithme de Google ne prend pas en compte l’orthographe dans ses nombreux critères, il n’en demeure pas moins que l’orthographe joue un rôle très important dans les requêtes de l’internaute. Le correcteur orthographique de Google est déterminant à chaque requête : il permet de circonscrire précisément la demande de l’internaute en excluant de nombreuses autres requêtes jugées moins pertinentes.

Comment fonctionne le correcteur orthographique de Google ?

Pour comprendre comment est traitée l’orthographe au niveau des requêtes utilisateurs, il faut comprendre comment Google reconnaît les fautes d’orthographe. Il existe trois modes de détection des fautes par l’algorithme.


Premier cas : la faute est nette et facilement reconnaissable. 

La requête tapée par l’internaute dans la barre de recherche représente pour Google une faute assurée : la faute fait alors l’objet d’une reconnaissance automatique par l’algorithme. L’algorithme fera ainsi tout le travail nécessaire pour que cette faute n'ait jamais existé : les résultats qui apparaissent dans la SERP seront bien orthographiés.

Si votre recherche porte effectivement sur la requête mal orthographiée (nom de marque par exemple), Google la mettra en suggestion. Ce sera à l’internaute d’effectuer la démarche de cliquer pour rechercher spécifiquement cette requête.

Par exemple, si vous effectuez la recherche “Facbook” au lieu du nom de célèbre réseau social, vous remarquerez que les résultats affichés sont sans équivoque : Google reconnaît la faute et la corrige automatiquement.

 

Correction automatique d'une faute de frappe par Google

 

Si vous souhaitez vous positionner sur cette requête mal orthographiée et profiter des nombreuses personnes dont les doigts ripent sur le clavier, ce n’est pas la peine de persévérer. Votre page n'apparaîtra que dans les résultats des internautes cherchant le mot “Facbook” et ayant cliqué sur le lien proposé par le correcteur d'orthographe ("Essayez avec l'orthographe Facbook"), soit sûrement un nombre très restreint d’internautes.


Deuxième cas : la faute est douteuse et peu évidente 

Google est un algorithme, et malgré toute la sophistication de son système de correction orthographique, il ne parvient parfois pas à identifier clairement une faute d’orthographe. Quand l’algorithme doute, il laisse le choix à l’internaute. Ainsi, sur un type de faute peu évident, Google va signifier à l’internaute que la faute est repérée, mais les résultats de la SERP vont être affichés avec la requête mal orthographiée.

Si l’internaute clique sur la requête suggérée, une nouvelle SERP apparaît avec la requête corrigée directement dans la barre de recherche.

Ainsi, si un internaute recherche sur Google le mot “restaurant” et tape malencontreusement “restaurat”, il rencontrera une SERP orientée vers ce terme avec une suggestion Google “Essayez avec cette orthographe :”. L’algorithme questionne l’intention de l'utilisateur, car des pages répondent à cette requête ( 1  510  000 résultats pour “restaurat” versus 4  100  000  000 pour “restaurant”). “Restaurat”, comme le précise la première page Wiktionnaire peut faire référence à un usage ancien et désuet du mot “restaurant”. Google hésite, c’est donc à l’internaute de choisir.

 

Proposition d'une correction orthographique par Google

 

Dans ce cas, qui correspond à la majorité de ce que l'on observe, il est possible pour le référenceur de positionner une page sur une faute d'orthographe. Il misera alors sur l’intention de l’internaute qui privilégiera le premier lien mal orthographié plutôt que la suggestion orthographique de Google. Si elle est risquée et peut être discutée du point de vue de l’éthique, cette stratégie implique pour le référenceur de soigner sa balise meta description et de proposer un résultat correspondant parfaitement à l’intention de recherche de l’utilisateur. En effet, l’internaute doit être rapidement convaincu par la page proposée pour choisir la SERP avec une faute.

Troisième cas : Google ne parvient pas à arbitrer sur les choix à proposer à l’internaute

Une faute peut-être grossière et sauter aux yeux d’un individu, il n’en va pas de la même logique pour Google : parfois, certaines fautes peuvent suggérer plusieurs mots différents. Contrairement aux cas précédents où la faute et sa correction sont évidentes, parfois, si la présence d’une faute ne fait aucun doute, la correction peut renvoyer à plusieurs réalités.

Google face à ce dilemme proposera aux internautes sur la SERP un mélange de différentes solutions : des résultats pour les différentes possibilités de correction, mais aussi pour les requêtes avec fautes.

Par exemple, la requête “mutuelle oto” sur Google affichera une SERP composée de “mutuelle moto”, “mutuelle auto”, mais aussi “mutuelle oto” (voir la vidéo Abondance à ce sujet). L’objectif de Google reste ici de proposer au moins une solution qui puisse satisfaire l’utilisateur.

 

SERP avec correction automatique par Google

 

Référencement et orthographe dans le moteur de recherche Bing

Mais dans l’univers étendu des moteurs de recherche, Google, même s’il est hégémonique, n’est pas l’unique modèle d'algorithmes qui existe. Qui dit multitude d’algorithmes dit multitude de manières de traiter l’orthographe.

Par exemple, le moteur de recherche Bing, si on en croit Duane Forrester, le chef de produit principal chez Bing.com et porte-parole SEO, fait de l’orthographe un des critères de classement d’une page web.

Duane Forrester, dans un billet paru en 2014 sur le blog de Bing, explique les choix d’un tel critère : « Why would an engine show a page of content with errors higher in the rankings when other pages of error free content exist to serve the searcher? Like it or not, we’re judged by the quality of the results we show » (« Pourquoi un moteur de recherche favoriserait-il une page mal rédigée si d’autres pages pertinentes et sans fautes existent pour l’internaute ? Nous sommes jugés par la qualité de ce que nous montrons. »)

La philosophie d’un moteur comme Bing suit donc le comportement naturel des individus : « Just as you’re judging others’ writing, so the engines judge yours ».  (« Si l’orthographe est un critère de jugement pour un individu, pourquoi ne le serait-il pas pour un moteur de recherche ? »)

Ainsi, toujours selon le même Duane Forrester, les fautes traditionnelles d’orthographe et de grammaire peuvent nuire au référencement d’une page web.

De même, Bing privilégie une certaine forme d’écriture bien précise : pénalité envers les phrases trop longues et trop développées, les ruptures syntaxiques et les phrases mal structurées, etc. Le moteur de recherche prend aussi en compte la mauvaise ponctuation dans les critères observés par l’algorithme. C’est la récurrence de certaines erreurs qui alertera le moteur. Ainsi, pas d’inquiétude, une simple erreur de frappe ne sera pas pénalisante pour votre page web.

Bing va encore plus loin dans la prise en compte de l’orthographe d’un site web : en regardant l’orthographe de quelques pages web d’un site, il pénalisera l’ensemble du site s’il estime que le contenu n’est pas de bonne qualité. Par conséquent, la rédaction d’un article sans fautes parmi d’autres pages web bâclées ne pourra pas tromper l’algorithme : toutes les pages se devront d’être sur un pied d’égalité concernant le style et l’orthographe.

Google et Bing proposent donc deux approches de l’orthographe sensiblement différentes avec comme finalité le même besoin de satisfaire l’internaute. Si Internet crée de nouveaux moyens d’expression sur le Web, la bataille de l’orthographe n’est pas pour autant définitivement perdue.

 

Et du côté de l'expérience utilisateur ?

En 2018, une étude intitulée “Quel dommage qu’il y ait autant de fautes” menée auprès d’un échantillon de 2 000 personnes représentatif de la population française analyse la perception des fautes d'orthographe par les internautes sur les sites de différentes marques.

L’objectif est de comprendre comment les fautes d’orthographe influencent la perception de la marque qu’ont certains utilisateurs. Les internautes sont exposés successivement à des sites comprenant des fautes d’orthographe et d’autres non, puis il leur est posé plusieurs questions pour connaître leurs intentions d’achat.

Les résultats de l’étude sont surprenants : les fautes qui ont le plus d’influence sur les achats des internautes en ligne sont les fautes typographiques : ponctuation, espaces et quelques légères fautes de frappe visibles. Les fautes liées à la grammaire et à l’orthographe sont peu détectées et peu jugées par ces internautes, même par ceux se définissant eux-mêmes bons en orthographe. Les sites avec fautes d'orthographe reçoivent ainsi autant d’intentions d’achat que les sites sans fautes.

Cette conclusion démontre que l’orthographe est un critère de qualité parmi d’autres. Les sites web sont principalement jugés pour leur qualité globale, que ce soit par Google ou par l’internaute lui-même. Mais si vous avez le choix (et on a toujours le choix), on ne peut que vous recommander de « rédiger propre » !

 

 

Tristan de la Chevasnerie, Fondateur de l'agence Pierrot (https://www.agencepierrot.fr/)