La mise en place d'un paywall (accès aux contenus uniquement sur inscription et / ou paiement) est une action assez courante sur le Web, notamment pour les sites de presse. Mais, en fonction de la solution choisie, cela peut avoir un impact SEO qui est loin d'être négligeable. Dans cet article, nous passons en revue les différentes solutions possibles et leur implication en termes de visibilité sur les moteurs de recherche. Un choix souvent cornélien...

De nombreux sites (comme Reacteur.com) utilisent des Paywall (accès abonnés) pour bloquer l’accès à un contenu. Pour pouvoir le lire, l’utilisateur doit souvent payer, s’abonner ou encore donner des informations personnelles. Mais comment gérer ces contenus « masqués » en référencement naturel ? C’est ce que nous allons voir ici.

Qu’est-ce qu’un Paywall ?

Un Paywall est le fait de restreindre l’accès à tout ou partie d’un contenu en échange d’une action de l’utilisateur. Pour voir la publication en entier, il peut ainsi être obligé de payer une somme forfaitaire ou un abonnement mensuel, de s’abonner à une newsletter ou encore de donner ses coordonnées.

Un exemple de Paywall sur le site lemonde.fr

L’intérêt d’un paywall est assez simple : monétiser ses contenus, et/ou fidéliser des lecteurs.

La problématique principale est que théoriquement, ces publications sont bloquées pour les moteurs de recherche et ne peuvent être référencées, du moins en théorie.

Les différents types de Paywall

Avant d’entrer dans le détail, il faut comprendre les différentes typologies de Paywall puisqu’elles ont un impact réellement différent sur le référencement naturel.

Paywall complet

Il s’agit d’un blocage par défaut de l’ensemble des contenus d’un site. Sans action de la part de l’utilisateur, il ne peut accéder à aucun article.

Paywall partiel (ou freemium)

Dans ce cas de figure, une partie des contenus est en accès libre (le début la plupart du temps), et le reste est protégé par un paywall. C’est par exemple la méthode utilisée par de nombreux sites de presse, comme Reacteur.com, Le Monde ou Libération.

Deux articles du site Libération.fr, celui de gauche est gratuit, et celui de droite est protégé par un Paywall (mention "abonnés")

C’est donc au rédacteur de choisir quels contenus il juge pertinents ou non pour la fonctionnalité du Paywall (nous en reparlerons plus loin).

Metered paywall

Il s’agit d’une méthode hybride. Le principe est simple : les premiers contenus consultés sont gratuits (par exemple les 5 premiers contenus lus), puis ils deviennent tous bloqués.

L’objectif est de donner envie à l’utilisateur avec les premières publications avant de le forcer à agir.

Paywall dynamique

Dernière méthode : les paywall dynamiques. L’idée est d’analyser le comportement de l’utilisateur pour adapter en temps réel les contenus bloqués, par exemple en fonction de sa fréquence de visite ou des thématiques qu’il a l’habitude de consulter.

C’est une méthode par contre bien plus complexe car cela nécessite un développement plus lourd pour analyser la navigation de l’internaute et adapter le paywall en conséquence.

Un intérêt commercial évident

Générer des revenus

Le principal avantage d’un paywall est bien entendu la monétisation. C’est d’ailleurs pour cette raison que beaucoup de sites de presse en ont mis en place, le tout afin de pouvoir financer le travail de leurs différents journalistes.

D’autres sites optent pour un Paywall pour les utilisateurs pour lesquels ils ne peuvent générer de revenus par la publicité. Ainsi le site de L’equipe.fr propose soit un Paywall, soit l’acception des cookies (et donc de la publicité qui va avec) :

L’equipe.fr affiche un Paywall ou l’acceptation des cookies pour accéder aux contenus.

Fidéliser

C’est également une excellente raison de basculer tout ou partie de ses contenus sur un Paywall : la fidélisation des visiteurs.

Très souvent, l’internaute est obligé de donner son adresse email, qui pourra alors être utilisée pour le relancer ou lui envoyer des newsletters et offres commerciales. Exemple : le Journal du Net.

Donner une sensation de qualité

C’est un biais cognitif, mais bien souvent les contenus derrière un Paywall peuvent sembler de meilleure qualité (« ils sont payants, donc ils doivent être meilleurs que leurs équivalents gratuits »). On peut donc utiliser le Paywall pour se démarquer de la concurrence et améliorer la crédibilité de son site web.

Pourquoi cela peut-il nuire au SEO ?

Pas de contenu à positionner

En fonction de la méthode de blocage utilisée (ce dont nous parlerons juste après), Google peut ne rien voir du contenu situé derrière le Paywall. Il ne pourra donc pas l’indexer, et l’URL sera donc difficilement visible.

Sans contenu, seuls les liens internes et externes auront de l’importance, ce qui peut réduire drastiquement les possibilités SEO.

Plus difficile pour obtenir des liens

Ce point est lié au précédent : puisque le contenu n’est pas visible facilement pour les visiteurs (et donc théoriquement pour les moteurs de recherche aussi), cela réduit considérablement la possibilité d’obtenir des liens naturels, et donc le référencement qui irait avec la popularité obtenue par ces liens.

Une sécurité à renforcer

Enfin, d’un point de vue technique, si la volonté est d’avoir un blocage complet, cela implique pour le développeur de renforcer la sécurité. En fonction de la méthode utilisée, on peut en effet parfois contourner les Paywall relativement facilement.

Les différentes méthodes de blocages

Avant d’aborder les stratégies à adopter, il faut choisir une méthode de blocage pour un Paywall.

Un blocage « front »

Ici le principe est simple : tout le contenu est présent dans la page (dans le code), mais il est masqué en CSS ou avec du JavaScript. C’est une méthode qui a de nombreux avantages :

  • C’est peu couteux et rapide à mettre en place ;
  • En général, la fonctionnalité pour afficher le contenu est souvent rapide à s’exécuter ;
  • Google est capable de lire tout le contenu, facilitant ainsi son indexation.

Il y a cependant quelques inconvénients :

  • Cela peut potentiellement être considéré comme du cloaking pour Google (mais le risque est vraiment faible) ;
  • L’internaute s’y connaissant bien en informatique peut facilement le contourner puisque tout le contenu texte est présent dans le code de la page.

C’est d’ailleurs pour cela qu’il existe de nombreuses solutions pour passer outre de façon automatique ces blocages à l’aide de « Bypass paywalls » :

Un exemple des sites où le paywall ne fonctionnerait plus avec une de ces solutions trouvée sur Internet

 

Un blocage « back »

Cette fois-ci, le contenu initial est vide. Ce n’est qu’une fois avoir passé la validation que le site web va générer le contenu pour le visiteur. Ce dernier ne peut donc pas voir le contenu tant qu’il n’a pas utilisé le Paywall, et cela en va de même pour les moteurs de recherche.

On s’assure ainsi que le contenu reste bien privé pour les utilisateurs classiques, mais cela prive alors le référenceur du contenu à indexer. C'est le cas de Reacteur.com par exemple.

Un blocage « back » partiel

Il existe aussi un entre-deux : un blocage du contenu côté back, mais où les différents visiteurs sont traités différemment :

  • L’internaute n’a accès à rien par défaut ;
  • GoogleBot a accès à l’intégralité du contenu.

On allie alors les avantages des deux solutions différentes. On peut se positionner dessus, tout en forçant l’utilisateur à utiliser le Paywall.

Seul bémol, une personne s’y connaissant bien pourra dans certains cas accéder quand même au contenu (mais cela sera plus complexe que dans un blocage « soft »). Et cela peut être considéré comme du cloaking par Google dans certains (voir ci-après). Pas négligeable...

Les différentes stratégies

Remarques préalables

L’ajout d’un Paywall aura le même impact quel que soit le format de vos contenus : ceux classiques, mais aussi ceux au format AMP, ceux présents dans Google News et ceux de Google Discover. C’est la solution technique choisie qui aura un réel impact.

Autre élément important à avoir en tête : si Google trouve deux contenus similaires en termes de qualité de contenu, de popularité et de confiance, le moteur de recherche risque de porter son choix sur celui sans Paywall. Donc si la concurrence est rude, il faudra vraiment réfléchir à la mise en place ou non d’un tel blocage.

If Google has to choose between a gated piece of content and a free piece of content that have roughly the same quality signals, Google is always going to rank the free content first—because it’s a better user experience.

Source https://cxl.com/blog/paywall-seo/

Utiliser systématiquement le balisage schema.org

Quel que soit le type de Paywall utilisé, il faut utiliser le balisage schema.org « hasPart » et « isAccessibleForFree » pour indiquer la présence d’une partie de texte bloquée derrière un Paywall.

Dans le cas d’un blocage CSS ou JS, cela évitera que Google considère le contenu comme du cloaking. Dans le cas d’un blocage « back », le moteur de recherche aura connaissance qu’une partie du texte pertinent n’est pas visible.

Ce balisage doit être intégré dans un balisage plus global. Voici l’exemple donné sur le site officiel avec l’intégration de ce balisage dans un schema.org « News » (source https://developers.google.com/search/docs/advanced/structured-data/paywalled-content?hl=fr) :

<script type="application/ld+json">
{
"@context": "https://schema.org",
"@type": "NewsArticle",
"mainEntityOfPage": {
"@type": "WebPage",
"@id": "https://example.org/article"
},
"headline": "Article headline",
"image": "https://example.org/thumbnail1.jpg",
"datePublished": "2025-02-05T08:00:00+08:00",
"dateModified": "2025-02-05T09:20:00+08:00",
"author": {
"@type": "Person",
"name": "John Doe"
},
"publisher": {
"name": "The Exemplary Times",
"@type": "Organization",
"logo": {
"@type": "ImageObject",
"url": "https://example.org/logo.jpg"
}
},
"description": "A most wonderful article",
"isAccessibleForFree": "False",
"hasPart":
{
"@type": "WebPageElement",
"isAccessibleForFree": "False",
"cssSelector" : ".paywall"
}
    }
</script>

Les parties importantes sont située à la fin du code : on y indique si l’ensemble du contenu est gratuit ou non (ici ce n’est pas le cas), et ensuite on précise la section HTML qui contient le texte masqué. Pour ce dernier point, on utilise un sélecteur CSS, dans l’exemple ici avec une section HTML dont la classe CSS est « paywall ». Attention, vous ne pouvez utiliser que des classes dans ce balisage, pas d’ID.

La partie « hasPart » peut également contenir plusieurs sections si tel est le cas dans votre contenu :

"hasPart": [

{

"@type": "WebPageElement",

"isAccessibleForFree": "False",

"cssSelector": ".section1"

}, {

"@type": "WebPageElement",

"isAccessibleForFree": "False",

"cssSelector": ".section2"

}

]

On pourra (et devra) ajouter ce balisage dans l’une des entités suivantes :

  • Article ;
  • NewsArticle ;
  • Blog ;
  • Comment ;
  • Course ;
  • HowTo ;
  • Message ;
  • Review ;
  • Webpage.

Enfin, vous pourrez tester votre balisage avec :

Ecrire deux contenus différents

C’est une autre solution : on rédige un premier contenu orienté 100% SEO. C’est lui que l’on va chercher à positionner sur le ou les mots clés qui nous intéressent. Ensuite, on va rédiger un second article plus abouti mais masqué derrière le paywall. Il suffira alors de pousser le lecteur présent dans le premier article à aller consulter le second.

Mais attention, cela implique de réussir à écrire deux contenus uniques, et de surtout apporter une réelle plus-value dans le contenu protégé par le Paywall.

Autoriser Google avec un blocage back partiel

Comme indiqué auparavant, on peut opter pour un blocage de l’internaute, tout en donnant un accès complet et immédiat à GoogleBot. C’est une bonne solution dans certains cas, car tous les internautes ne sauront pas contourner les Paywall, mais c’est loin d‘être parfaitement fiable :

  • Des extensions de navigateurs permettent de contourner facilement le blocage ;
  • Ceux s’y connaissant en code y arriveront eux aussi facilement ;
  • Il faut s’assurer que l’on est capable de bien détecter GoogleBot.

Il faudra aussi bloquer certaines fonctionnalités du moteur de recherche. Si on laisse tout le contenu dans l’HTML pour les robots, ces parties devront être balisées par un data-nosnippet pour éviter que ces textes puissent apparaître dans le moteur de recherche (par exemple, dans la description de votre résultat) :

<div data-nosnippet>not in snippet</div>

Plus d’informations ici sur cette solution : https://developers.google.com/search/docs/advanced/robots/robots_meta_tag?hl=fr#data-nosnippet-attr

Il est aussi recommandé d’ajouter une directive noarchive pour ne pas afficher la page en cache dans les résultats de Google. Pour cela, on peut utiliser un entête HTTP :

X-Robots-Tag: noarchive

On peut aussi utiliser tout simplement la meta robots :

<meta name="robots" content="noarchive" />>

Plus d’informations ici sur cette méthode : https://developers.google.com/search/docs/advanced/robots/robots_meta_tag?hl=fr#xrobotstag

Les solutions à faible impact SEO

En résumé, si les aspects SEO sont importants pour vous, on vous conseille :

  • L’utilisation systématique du balisage schema.org ;
  • La mise en place d’un blocage soft ou metered ou dynamique ;
  • Mais de mettre en place les data-nosnippet et noarchive dans votre code.

Et ceci en gardant en tête que cela n’empêchera pas les internautes de contourner plus ou moins facilement le Paywall.

Dois-je mettre en place un Paywall ?

C’est la vraie question à se poser. Et malheureusement la réponse sera variable en fonction du projet. Votre site et votre secteur d’activité sont différents des autres. Ce qui s’y appliquera ne sera pas adapté pour un autre.

D’abord, il faut se poser la question de l’intérêt économique et celle de la communicaton : les lecteurs sont-ils prêts à payer/s’abonner/donner leurs informations ? Et comment le contenu s’inscrit-il dans la stratégie globale du site ?

Le site Underlines a créé à ce sujet un excellent schéma d’aide à la décision. Il pourra vous aider :

Un schéma d’aide à la décision sur la mise en place d’un Paywall sur un contenu. Source : https://underlines.consulting/underlines-stories/cet-article-gratuit-ou-payant/

Ensuite, il faut définir la stratégie à utiliser. Comme nous l’avons vu, certains Paywall n’auront aucun impact sur le référencement naturel, d’autres seront réellement bloquants. Parfois il est impossible de le contourner (il faut par exemple se connecter), et d’autres fois on peut facilement passer derrière. Il faut donc prendre en considération l’importance ou non du SEO dans la stratégie du site, que ce soit à court, moyen et long terme, et voir si la présence d’un Paywall fiable est indispensable ou non d’un point de vue économique.

Et si enfin vous décidez d’en mettre un en place, il faudra déterminer la typologie de Paywall à créer (complet, partiel, metered ou dynamique), ainsi que la solution technique principale à appliquer (soft, back, back partiel).

Conclusion

En d’autres termes, la mise en place d’un Paywall sur un contenu est loin d’être un choix anodin, que ce soit d’un point de vue économique et marketing, que d’un point de vue technique et SEO.

Plus la visibilité aura de l’importance pour vendre vos produits et services, plus le paywall est risqué (du moins celui où l’on bloque Google). Dans les autres cas, le risque est qu’il soit inefficace car facilement contourné. Mais ne pas en mettre peut vous priver de revenus supplémentaires.

Vous devrez donc arbitrer entre positionnement SEO, chiffre d’affaires, fidélisation et image de marque. C’est un choix cornélien. Et la réponse l’est tout autant : cela dépend.


Daniel Roch, consultant WordPress, Référencement et Webmarketing chez SeoMix (https://www.seomix.fr)