Déposer un avis en ligne permet à chaque consommateur d’exprimer son opinion sur une expérience de consommation. Si chaque consommateur demeure libre d’exprimer cette opinion, il n’en demeure pas moins soumis au respect de la loi, notamment aux dispositions relatives à la diffamation. En témoigne la condamnation récente d’un individu condamné à payer 1 800 € d’amende suite à la publication de deux avis diffamatoires.

Les faits des deux condamnations

Dans le cadre d’un projet de cession de bail commercial, un individu a fait appel à un notaire afin de l’assister. La cession n’ayant pas aboutie, l’individu a tenu le notaire pour responsable de cet échec. En guise de représailles, l’individu a publié sur Google les deux avis suivants : « Un notaire qui ne mérite pas d'être connu » et « Escroc de notaire. Une honte d'avoir ça en France. ».

Après avoir découvert ces avis, le notaire a engagé une procédure en citation directe à l’encontre de l’individu pour diffamation. Dès ce stade, il est important de souligner que la diffamation peut être attaquée soit devant un tribunal civil pour obtenir des dommages et intérêts, soit devant un tribunal pénal pour obtenir une amende et/ou une peine de prison (et oui, des personnes ont déjà fait de la prison pour des propos diffamatoires en France). Le notaire a choisi la voie pénale et s’est même constitué partie civile pour obtenir des dommages et intérêts… Motivé…

L’individu ne s’est pas présenté au tribunal de telle manière qu’il n’a pas pu se défendre… Et, logiquement, cette procédure a abouti à sa condamnation.

Concrètement, le tribunal pénal a condamné l’individu à une amende de 500€ avec sursis (c’est-à-dire qu’il ne la paye pas) comme peine, mais également à 1.000€ de dommages et intérêts et 800€ de « remboursement » des frais d’avocat (c’est juste un forfait, un avocat coûte plus cher).

Qu’est-ce, concrètement, qu’une diffamation ?

La diffamation est un délit de presse. En d’autres termes, elle n’existe que sur un support, par exemple, un journal, un site ou à la télévision, mais également dans le cadre de réunions publiques ou dans la rue.

C’est la fameuse loi du 29 juillet 1881 qui régit les délits de presse. Aux termes de l’article 29 de cette loi, est une diffamation « toute allégation ou imputation d'un fait qui porte atteinte à l'honneur ou à la considération de la personne ou du corps auquel le fait est imputé ». L’injure est une « expression outrageante, termes de mépris ou invective qui ne renferme l'imputation d'aucun fait ».

La peine est une amende de 12 000 €, mais, si la diffamation ou l’injure est faite « envers une personne ou un groupe de personnes à raison de leur origine ou de leur appartenance ou de leur non-appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée » ou « à raison de leur sexe, de leur orientation sexuelle ou identité de genre ou de leur handicap », alors le délit est puni d’un an de prison et de 45 000 € d’amende.

En d’autres termes, dans le cadre de la diffamation ou de l’injure, l'intention coupable est présumée, c'est-à-dire que l'auteur des propos aura à charge de prouver sa bonne foi. Pour cela il devra réunir quatre conditions :

  • La sincérité (le diffamateur croyait vrai le fait diffamatoire) ;
  • La poursuite d'un but légitime (le souci d'informer et non de nuire) ;
  • La proportionnalité du but poursuivi ;
  • La proportionnalité du dommage causé et le souci d'une certaine prudence.

Ainsi, contrairement à ce que la très grande majorité croit, il ne suffit pas de prouver que le fait allégué était vrai pour être disculpé, mais bien de réunir ces quatre conditions.

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Alexandre Diehl
Avocat à la cour, cabinet Lawint (https://www.lawint.com/)