Marie Pourreyron travaillait déjà dans le monde du SEO à une époque où on appelait encore cela "référencement naturel". Elle nous plonge dans cet article 10 ans en arrière pour nous faire vivre le quotidien d'une référenceuse à cette époque-là. A vous de voir si cela a vraiment beaucoup changé par rapport à aujourd'hui...

Par Marie Pourreyron

C'était il y a 10 ans...

Un jeudi, de l'an 2008... Je m'installe à mon bureau, démarre mon iMac et lance Google Reader. Une tasse de café à la main, j'attaque la lecture de mes flux RSS pour lire les nouveautés du petit monde du SEO français et surtout outre-Atlantique. J'espère qu'une Google Dance va avoir lieu pour enfin prendre quelques points de PR sur mes nouveaux sites, il faut avouer que d'avoir un PR0 ce n'est pas l'idéal pour faire des échanges de liens... Dommage car après avoir acheté des contenus en masse à des Malgaches bon marché et qui écrivent plutôt bien, j'avais un gros site et j'ai hâte de pouvoir négocier un lien dans le footer via un échange triangulaire, histoire de brouiller les pistes. Après avoir fait le tour des meilleurs forums SEO (Taggle, la Sphère, etc...) je constate qu'il va falloir attendre un peu pour une prochaine Google Dance. Je lis les derniers messages et j'apprends que l'Association SEO Camp vient d'être créée, bonne nouvelle même si je redoute que ça soit une énième tentative qui avorte. J'espère qu'ils organiseront des événements où nous pourrons nous réunir et entretenir notre réseau. C'est quand même très important d'avoir un bon réseau pour échanger, tester, et surtout, se faire des liens (réels ou numériques).

Tiens je viens de lire sur Abondance que le moteur Ask.com est en fin de vie et que 80% du personnel va être licencié. Il faut avouer qu'en termes de part de marché, ce moteur ne représentait plus grand chose. L'ogre Google va finir par manger tous les autres moteurs. Rendez-vous compte, Google représente déjà 90% des parts de marché en France ! Aux Etats-Unis, l'audience de Google a pour la première fois dépassée celle de Yahoo. Yahoo semble vraiment ne pas pouvoir remonter la pente, d'ailleurs chez Oseox, Aurélien pense que Yahoo est en train de s'autodétruire, rien que ça ! Et pour cause, à la moindre requête, Yahoo vous retourne majoritairement des liens sponsorisés. J'ai testé et j'ai compté 15 liens sponsorisés, dont 5 premiums. Il faut beaucoup scroller pour arriver au premier lien naturel, quelle histoire. Nous avons tous compris que Yahoo avait besoin d'argent mais ces liens sponsorisés, c'est vraiment pénible. Cette hégémonie de Google inquiète beaucoup. Heureusement qu'en Europe nous avons des idées et des projets et le projet Quaero va bénéficier de 99 millions d'euros. Ce consortium coordonné par Thomson travaille sur le développement de la technologie du moteur Exalead censé concurrencer Google. Honnêtement je n'y crois pas trop, même si ce moteur renvoie des résultats cohérents, les moyens alloués restent vraiment minimes par rapport à la puissance de Google qui a, jusque-là, écrasé tout le monde sur son passage. Comment rivaliser ? D'ailleurs Google vient de racheter Doubleclick et n'arrête pas d'étendre sa puissance sur la toile. Après avoir visité le blog de Matt Cutts, je me dis qu'il est temps de me mettre réellement au travail.


Direction Google Analytics ! Allons voir les statistiques de la veille et surtout les mots clefs qui m'ont apporté du trafic. Je crois que c'est ce que je préfère découvrir : quels sont les termes que mes visiteurs cherchent dans Google. C'est très utile pour valider la stratégie de mots clefs ! Je n'ose imaginer comment nous ferions sans ces mots clefs... je lance SeeUrank pour vérifier mes positions. Quand je pense que certains de mes confrères participent au concours SEOContest2008... Honnêtement, après le Mangeur de Cigogne, aucun concours SEO n'a été aussi drôle ... et instructif ! Nous avons vraiment rigolé avec le Mangeur de Cigogne, une vraie communauté s'est montée et il y avait un bon esprit. Mais comment avons-nous pu spammer autant ? En particulier les livres d'Or russes mais aussi Wikipedia... Enfin, je n'y ai pas participé mais je sais que d'autres ne se sont pas privés. Il faut dire que Wikipedia est en dofollow, mais pour combien de temps encore ? D'ailleurs quelle hérésie ce nofollow non ? Il va tuer le Web, c'est certain, cela va à l'encontre de l'essence même du partage et des liens qui sont au coeur de l'algorithme de Google. En parlant de lien, il faut maintenant bien réfléchir à la construction de ses liens internes car je viens de lire que seule la première ancre compterait... Des confrères ont fait des tests à ce sujet et cela semble confirmé. Peu importe, avec un site bien construit et une pirouette, ma CSS pourra faire passer mon menu en bas du code et je pourrai placer exactement l'ancre que je souhaite sur mon premier lien. On trouve toujours le moyen de contourner la règle ! Enfin j'espère qu'Internet Explorer arrivera à interpréter tout cela correctement, c'est quand même plus de 65% de part de marché.

En parlant de part de marché, c'est peut-être anecdotique aujourd'hui, mais avec le lancement révolutionnaire de l'iPhone l'année dernière, il faut peut-être se demander si dans le futur, nous allons commencer à utiliser nos téléphones pour naviguer régulièrement sur le web. Je pense à cela car je viens de lire qu'il y avait un nouveau format de publicités en images sur Adwords et qui vise les visiteurs de pages Web mobile. Il faut reconnaitre que de plus en plus de personnes ont un mobile tactile, qui aurait imaginé cela il y a 10 ans ? D'ailleurs, depuis le temps que nous disons, en plaisantant, que le SEO est mort, est-ce qu'il sera réellement mort dans 10 ans ? Sur quoi Olivier Andrieu va-t-il bloguer si le référencement naturel disparait ? Et que ferais-je comme métier dans 10 ans, serais-je encore en train de faire des analyses de mots clefs, des audits pour lever les freins techniques et optimiser le crawl de Google et de la production de contenu pour produire toujours plus de pages qui serviront à se positionner, y compris sur la longue traine ?

Retour vers le futur...

Retour en 2018. Nous n'avons pas vécu une révolution en 10 ans, mais une évolution. Nous avons dû nous adapter et apprendre à éviter les coups de bambou du zoo Google, profiter des opportunités offertes par le moteur pour accroître notre visibilité, toujours expérimenter pour essayer de tirer notre épingle du jeu. De nouveaux outils nous facilitent la tâche, d'autres ne sont plus disponibles. Les opportunités offertes pour être visibles se sont multipliées et il faut continuer de se tenir à la page pour ne pas se laisse dépasser. Les forums et les blogs y ont laissé des plumes. Désormais, l'échange se fait sur les réseaux sociaux ou mainstream, mais l'essentiel est toujours là. Un site bien construit, avec de bons liens et un contenu intéressant, reste une base qui fonctionnait en 2008 et qui fonctionne encore en 2018. Certes il faut désormais penser mobile d’abord et vitesse d'affichage, mais en 2000, avant la généralisation de l'ADSL, nous faisions des sites légers, nous n'avions pas le choix. Nous savons donc faire et de ce côté là, finalement, c'est presque un petit retour en arrière. Quant à moi, je vous donne rendez-vous dans 10 ans, espérant être raccordée à la fibre d'ici là. Car non, ne rigolez-pas, je ne l'ai toujours pas...


Marie Pourreyron, fondatrice de l'agence Atiref (http://www.altiref.com/).